Exquises parenthèses à Aix
Ceux qui la connaissent l’aiment tant qu’ils rechignent parfois à en parler… Modeste croissant de terre (3 km de long sur 700 m de large) émergeant du pertuis d’Antioche, l’île d’Aix est la seule de l’archipel charentais à n’être accessible qu’en bateau. Vingt minutes de traversée depuis la Pointe de la Fumée à Fouras suffisent à former invisiblement la parenthèse où elle s’abrite.
Après la courte croisière qui procure le plaisir de doubler Fort Boyard, le débarcadère de la Pointe Sainte-Catherine sert d’antichambre à la découverte d’un charmant petit monde à part. Le village fortifié, d’abord et le maillage de ses sept ou huit rues aux maisons blanches et aux volets multicolores envahies, aux beaux jours, de ribambelles de roses trémières ; quelques cafés et restaurants, une poignée de boutiques, le musée Napoléon (ultime résidence de l’empereur sur le sol français avant sa reddition aux Anglais et son départ pour l’exil), celui de la nacre (où œuvre encore le dernier nacrier de France), une église, les vestiges d’un prieuré…
Le tour est rapidement fait jusqu’à franchir les remparts au nord. D’une étonnante variété (petites criques, grandes plages, bois, parcs ostréicoles, marais, falaises…), le reste de l’île se parcourt exclusivement à pied, à vélo, ou pour qui veut, en calèche. Aucune voiture – hormis celle du facteur et peut-être celle du médecin – n’est autorisée à perturber la tranquillité de ce « site naturel remarquable » aimé des oiseaux migrateurs.
Parcourus en une à trois à heures selon le moyen de transport qu’on préfère, les 7 km de sentiers côtiers rappellent aussi le passé militaire de l’île : les anciennes batteries, à l’ouest, et le fameux fort Liédot dessiné par Napoléon. La douceur de vivre ambiante contraste avec les architectures guerrières. Et l’impression s’accentue encore quand on peut laisser refluer les touristes de la journée (jusqu’à 4000 en été) pour passer une nuit sur place.
Ile madame, l’île presque
Madame l’île, petite Madame... Plus petite des quatre de l’archipel charentais, l’île Madame est aussi la plus proche du littoral. Accrochée à la côte par un kilomètre environ de cordon ombilical de type tombolo, elle mute quatre fois par jour du statut d’île à celui de presqu’île.
Il faut viser la marée basse et savoir les coefficients pour emprunter, depuis Port des Barques, le chemin de sable et de galets qui fait office de voie d’accès. L’arrivée est superbe jusqu’à ce petit bout de terre (0,78 km2) posé à la sortie de l’estuaire du fleuve Charente.
A part la balade, la pêche à pied (à l’assaut des huîtres sauvages !), la visite du fort et celle de la ferme-auberge aquacole, peu de choses à faire, mais beaucoup à apprendre. L’île minuscule a un concentré d’histoires à raconter : celle du Puits des Insurgés construit par des Communards emprisonnés dans le fort sous la Commune de Paris ; celle, plus tragique encore, des 254 prêtres réfractaires inhumés depuis 1794 après avoir succombé aux conditions inhumaines de leur détention sur des navires-prisons sous la Révolution.
Tous les ans, au 15 août, un pèlerinage honore leur mémoire. Un calvaire et une grande croix de galets blancs formée à l’entrée de l’île rappelle aux visiteurs que les paradis d’aujourd’hui peuvent avoir un passé d’enfer.